vendredi 20 mars 2015

L'éternelle et intense Blue Lady


C'est parce qu'à mes yeux, elle représente la quintessence de l'art chorégraphique que je souhaite aujourd'hui vous présenter le ballet solo "Blue Lady". Avec cette œuvre, la chorégraphe Carolyn Carlson a réussi l'exploit d'exprimer un quelque chose d'inexprimable un sentiment universel indicible et diffus d'infini, de déjà vu et pressenti...

Quand Carolyn Carlson chorégraphie "Blue Lady" (1980) elle vient de prendre la direction du Théâtre de la Fénice de Venise.
Pour saisir l'essence et comprendre la genèse de ce ballet il faut donc se transporter à Venise, dans ce lieu poétique et aquatique où l'eau donne le tempo. Carolyn est dans son studio, son mari compositeur René Aubry est à ses côtés. Il compose la musique pendant qu'elle compose les pas. L'eau les inspire, que ce soit par les bruits des vagues qui clapent sur les murs, rythme ternaire, que l'on retrouve tout le long de sa musique, ou par la lumière qui s'y reflète et s'y décompose. Jeu de reflets, d'ombres et de lumières qui constitue un des éléments centraux de la chorégraphie.

Le ballet "Blue Lady" est à l'image du lieu où elle l'a créée : poétique. Carolyn Carlson définit son travail de "poésie visuelle". Une succession de tableaux vivants où danse et scénographie se fondent. La spiritualité est au centre de sa danse, fortement marquée par la philosophie bouddhiste, elle parle d'élévation, du cycle de vie, de continuité. L'idée d'un passé lointain, d'une mémoire intuitive d'une vie avant la vie n'est jamais loin, ses croyances spirituelles sont finement conjuguées dans ses œuvres. "Blue Lady" est d'une remarquable intensité dramatique. 

La structure du ballet...
Quatre tableaux représentent quarte ages différents.
Premier âge
Et celui de la naissance et de l'enfance, composé de mouvements joyeux, enfantins, ludiques...  

Deuxième âge
C'est le temps des changements d'humeurs, de la transformation, la longue tenue du personnage joue au vent sur les notes de If I Were a Tree/Blue Lady d'Aubry fait de grands mouvements en diagonale et circulaires, de courses qui emplissent la scène...

Troisième âge
Habillée d'une robe-drap rouge vif et élastique (Red Dress), qui constituera la marque visuelle la plus célèbre de la pièce, elle s'étire dans un déplacement lent qui évoque à la fois une métamorphose animale, de la grossesse à la naissance...

Quatrième âge.  
Dernier âge. Celui de la vieillesse. Carolyn Carlson apparaît en robe et chapeau noir, canne-parapluie à la main. Les mouvements sont lents, saccadés. Elle est courbée et effectue ses derniers mouvements derrière les persiennes qui retombent sur la musique intitulée "Vendredi 13". Elle se déshabille progressivement pour se retrouver en robe jaune, dernier élan de vie et de légèreté pour partir vers la lumière du fond de la scène...

C'est dans cette partie du ballet à l'intensité extrême, qu'on retrouve dans une séquence Carolyn Carlson mimer et mettre en mouvement le fameux tableau du "le cri" d'Edward Munch.
(voir dans la vidéo ci-dessous)



   
Musique et danse... 
La répétition des gestes, les mouvements circulaires, les rondes autour d'elle-même, autour d'un centre, petits et grands qui caractérise ce ballet renforce ce sentiment d'infini, de continuité. La musique est construite comme la danse, par des séquences répétitives. Danse et musique s'entrelacent, comme dans une fugue, tantôt l'on entend plus que l'on voit, tantôt l'on voit plus qu'on entend. Comme dans la vie, le musicien et la danseuse sont partenaire, ils dansent et jouent ensemble le cycle de la vie.

Carolyn Carlson aujourd'hui, l'éternelle "blue Lady"...
En tant que fidèle fan de Carolyn Carlson, je ne peux que vous encourager à aller voir son dernier Ballet solo "Dialogue with Rothko" dont la vidéo teaser, en fin de page, laisse entrevoir toute l'intensité dramatique et la force d'interprétation de Carolyn Carlson dont je vais taire l'âge et qui ne semble lui inspirer que de la force et de la beauté...

Lieux :
 http://carolyn-carlson.com/tournees/dialogue-with-rothko-10/


Blue Lady : Extrait deuxième tableau


Blue Lady : Troisième tableau "The red dress"


Blue Lady : Dernier tableau


Teaser : Dialogue with Rothko


http://carolyn-carlson.com/


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